C’est un rôle de « réparation » unique des cellules T régulatrices (Tregs) dans la cicatrisation des fractures osseuses qui vient d’être décrypté par cette équipe de biologistes et de rhumatologues de la Huazhong University of Science and Technology (Wuhan, Chine). Ces travaux qui décryptent la double fonction des Tregs, à la fois immunosuppressive et réparatrice, publiés dans la revue Frontiers of Medicine ajoute à notre compréhension de la réponse immunitaire dans la régénération tissulaire.
Les Tregs constituent un sous-ensemble de cellules T connues pour leur rôle dans le maintien de la tolérance immunitaire et la prévention de l’auto-immunité, cette recherche révèle qu’elles jouent un rôle essentiel dans l’interaction complexe entre le système immunitaire et la réparation osseuse.
La cicatrisation des fractures osseuse est un processus complexe qui implique une cascade d’événements, notamment l’inflammation, la réparation et le remodelage. Si la phase inflammatoire initiale est cruciale pour préparer le terrain à la réparation, une réponse inflammatoire excessive ou chronique finit par entraver le processus de guérison.
Les Tregs modulent la réponse inflammatoire, facilitant la transition vers la phase de réparation
L’étude, menée via une série d’expériences in vivo et d’analyses in vitro, cherche à décrypter le rôle unique des Tregs au cours de ce processus de réparation des fractures. L’équipe chinoise montre en particulier que :
- la présence de Tregs sur le site de la fracture est associée à de meilleurs résultats de cicatrisation ;
- les Tregs exercent ces effets réparateurs en sécrétant des cytokines spécifiques qui favorisent la résolution de l’inflammation et améliorent l’activité des ostéoblastes, les cellules responsables de la formation osseuse ;
- les Tregs peuvent interagir directement avec d’autres cellules immunitaires, telles que les macrophages, pour moduler leur activité : cette interaction est importante pour faire passer l’environnement de la plaie osseuse, d’un état pro-inflammatoire à un état propice à la réparation tissulaire ;
- une voie de signalisation activée par les cytokines dérivées des Tregs est identifiée, qui conduit aussi à une augmentation de la production de matrice osseuse.
Pris ensemble, ces résultats confirment la fonction réparatrice des cellules T régulatrices bien distincte de leur fonction immunosuppressive mieux connue : un double rôle des Tregs qui pourrait avoir des implications dans de nouvelles stratégies thérapeutiques ciblées visant à accélérer la cicatrisation des fractures, en particulier en cas de retard de cicatrisation, mais aussi de nombreux types de plaies chroniques. Car ces travaux décrivent aussi toute la complexité de l’environnement immunitaire dans la cicatrisation des plaies et la nécessité de mieux comprendre les interactions entre les différents types de cellules immunitaires et leurs contributions au processus de cicatrisation.
Les chercheurs suggèrent ici
- une approche plus nuancée de la modulation de la réponse immunitaire en pratique clinique, qui tienne compte du potentiel des cellules immunitaires à favoriser la réparation tissulaire tout en préservant l’homéostasie immunitaire.
Enfin, ces données contribuent au domaine plus large de la médecine régénérative, en soulignant le potentiel de la modulation des réponses immunitaires pour améliorer la réparation, la récupération et la régénération des tissus.
Source: Frontiers of Medicine 15 June, 2024 DOI: 10.1007/s11684-023-1024-8 A distinct “repair” role of regulatory T cells in fracture healing